dimanche 23 novembre 2014

Transatlantique


Ca y est, dans 24 heures, on sera partis, décollés du ponton où on se balance depuis quelques jours entourés de nos copains marins et de boissons fermentées à base de canne à sucre.

L'arrivée à Mindelo, notre dernière étape terrestre, a été magique de suite. On accoste à côté d'un bateau qui me dit quelque chose sur lequel un mec me dit quelque chose. C'est Cabochard, le bateau de Pierre et Chantal Ory, des potes de mes parents. ils étaient là tous ensemble il y a 30 ans, mes parents sur Malamok, Pierre et Chantal sur l'ancien Cabochard. Là, c'est moi qui tombe dans les bras de Pierre une fois sautée sur le ponton.



Retrouvailles et caïpirinha


Seule marina du Cap-Vert, donc plongeoir idéal vers le Grand Large, on est entourés de bateau prêts à faire le grand saut océanique. On a des copains à chaque ponton, c'est l'hypersocialisation avant notre ermitage à 6.

Le bateau est presque prêt, et nous aussi.

Demain, 14h, on s'échappe en gang de voiliers amis cueillir plus d'horizon.

A bientôt les loups de terre, dans 17 à 20 jours, sous d'autres longitudes.



mardi 18 novembre 2014

"Petit pays, je l'aime beaucoup"

Aujourd'hui je vous offre la bande son de la lecture :



On est arrivés au petit matin sur le côtes de l'île de Sal. Je fantasmais le Cap Vert depuis longtemps, et je ne suis pas déçue. Ici je reconnais un peu les Antilles, Pauline elle y voit le Gabon. On trouve le petit peu qu'on connait, et plein d'autres choses aussi. On a mouillé à Palmeira, petit village de pêcheurs dont la moitié de la population semble être des enfants, qui sont les rois des rues. 

Abalone en mode BG, au soleil couchant d'Afrique


Biblioteca municipal

La brouette, indispensable pour transporter l'eau, sert aussi bien pour les copains


Fin d'aprem, les gosses sortent de l'école pour une séance de sport sur la plage

Forcément, d'autres gosses s'amusent aussi (oui je sais, Pauline saute TOUJOURS plus haut que moi)


Elle lisait, debout,  seule, au milieu des épaves de bateaux





Un dimanche matin tôt pour notre dernière sortie à terre avant d'appareiller pour une nouvelle île, on s'est posés près de l'église avec Pauline. Les portes grandes ouvertes permettaient aux chalands qui passent de profiter de la messe sans s'aventurer dans l'église bondée. Les enfants avaient bien leur carnet de chant de messe, mais préféraient tout de même la pêche à la crevette à l'omélie. On a retrouvé Loucas, notre péposé aux amarres de l'annexe depuis l'arrivée. Un petit bonhomme de 10 ans qui baragouine pas mal français, le fils du mécanicien des pêcheur, il connait tout le monde. A le croire, tous les gosses autour ou presque sont ses cousins. 

Loucas et son cousin Vicky
Pendant cette messe de dimanche, Loucas est devenu reporter. Avec ses gants de Pirate des Caraïbes ("les Caraibes, comme la où tu vas"), il prenait bien soin de mon appareil alors je lui ai confié. Voici donc le reportage de notre pote Loucas :



Derrière moi, l'église se remplit tranquillement, une demi heure après l'heure annoncée de la messe




Malgré tout ces sourires, on a quand même quitté Sal. On est à Boa Vista depuis deux jours, à Porto Sal Rei, voici la plage où on débarque et on se baigne en attendant l'annexe si on s'est fait déposés :



Et on repart cette aprem, pour une nouvelle île et de nouvelles aventures.

Peu ou prou(e) - quand je divague

Un matin, allongée sur le roof, à l'avant du bateau.




Etalée sur le dos, les bras en croix. Mon jean de mer est si salé qu'il est une deuxième peau, vaguement moulé sur moi. La toile s'amenuise mais le sel la renforce. Bientôt, il tiendra debout. Il pourrait peut-être prendre les quarts à ma place. Mais je ne lui laisserait pas ce privilège. Jean de mer et haut de maillot, pourtant j'ai l'impression de n'être vêtue que de soleil.
Je ferme les yeux, j'entends la coque scinder la mer en deux, les vagues s'écarter en stéréo, le vent remonter la proue et me longer comme si j'étais partie prenante d'Abalone, une bosse de plastique, un tas d'amarre, un amas de voiles...

Le vent est chaud, j'ai choisi l'obscurité, les yeux fermés pour sentir plus fort. Mais je vois le soleil haut à travers mes paupières closes. Il racole en flamboyance. Je résiste à la tentation d'y jeter un œil.

Je fais la planche sur ce bateau qui file et je vole. Plus vite. Plus loin. Puis je ne sais plus. Depuis combien de temps est-ce que je suis allongée ici ? Peut-être est-ce que j'ai basculé à la verticale ? Peut-être que je me suis inclinée, transformée, tu vois l'idée ? Je crois que je suis devenue une figure de proue. Les bras étendus, je m'agrippe de chaque côté pour anticiper les embardées régulières du roulis. Ou alors pour résister à cette tentation de tout lâcher, m'extirper, m'envoler et plonger. Dessous, les abysses. Des milliers de mètres. La tentation du vide, comme à chaque désert, à chaque horizon.

Des embruns m'assaillent sur tribord. Je frissonne. Je ne suis donc pas de bois. Elles n'ont pas l'air si enjouée les belles figées de proue. Elles n'étendent pas les bras, souvent elles n'en ont pas. De toutes façons, j'ai la crinière trop courte pour faire une bonne sirène à afficher en proue. Pis je suis plutôt pirate.

Mardi 11 novembre, au large de la Mauritanie, à la proue d'Abalone, je suis certainement parmi les plus heureuses du monde. Pour être heureux, on dit qu'il en faut peu. Peu ou prou(e).

Des Canaries au Cap Vert, vie de bord


Je vous écris quelques milliers de kilomètres plus sud que la dernière fois. On poursuit toujours cette échappée belle, vaillants et heureux, mais on n'ira pas plus bas qu'ici. Maintenant ça sera surtout cap à l'Ouest.

Abalone caracole quand le vent le veut bien. On a mis 6 nuits et 5 jours à rallier le Cap Vert. 6 jours et 5 nuits sur la mer jolie, seuls à part des nuées de poissons volants qu'on se plait à observer des heures, des dauphins forcément, des baleines à peines croisées et une tortue qu'on a failli déranger en pleine sieste à l'approche du Cap Vert. Ah et des milliers d'étoiles forcément.

On a remis à poste la vieille barre franche, la barre à roue n'inspirant qu'une moyenne confiance par gros temps. Ça permet un sport quotidien apprécié des hommes du bord :

 

Ils s'attèlent aussi à d'autres tâches, je vous rassure :
Une de nos émotions de nav' est d'entendre filer la ligne sur le moulinet. Les touches sont plus nombreuses que les prises, il faut l'avouer. Elles arrivent souvent en milieu d'une collective sieste, ou d'un apéro. Tout le monde se rue à l'arrière, chacun son poste pour tenter de chopper la bête. Sauf que des fois elle nous échappe, laissant une impressionnante marque de dents sur le rappala, ou emportant carrément avec elle le poulpe de latex qui brille au bout de la ligne. Mais des fois quand même, ça fonctionne, pour le bonheur de nos estomac, la dorade coriphène est un délice :



Si dans côté on lutte pour tenter de chopper quelques chairs marines fraîches, d'un autre, on retrouve parfois sur le pont de suicidaires poissons qui ont loupé leur atterissage. Ces eaux atlantiques regorgent de poissons volants qui s'envolent en groupe, parfois sur des centaines de mètres, c'est vraiment impressionnant à observer. On les dérange alors c'est comme si ils s'échappaient de la coque, et planant au ras de l'eau, rebondissent parfois d'un coup de queue, et disparaisse se perdre quelques vagues plus loin. 

Au matin donc, on en trouve parfois qui ont loupé la vague et on atterri sur le roof au lieu d'amerrir. Celui-ci, tout petit, n'a pas eu de chance, mais au moins il connaîtra la gloire:



Et puis, on a fini par rallier la terre, où l'on profite de soirée moins penchées et secouées qu'à l'accoutumée pour installer une salle de projection dans le cockpit : un ordi des enceintes, des pop corn, des coussin et bienvenue au Grand Rex Abalonien.





samedi 8 novembre 2014

El Hierro, paraiso del fin del mundo

Après trois semaines à collectionner les volcans, on quitte ce soir la petite dernière des Canaries, el Hierro, qui nous a retourné le cœur par tant de douceurs.

Valverde, la capitale


Cette une île nouvelle, elle a même repris sa croissance il y a trois ans, comme quoi tout n'est peut-être pas perdu pour moi. Une éruption sous marine a eu lieu en 2011 juste en face du petit port de La Restinga où on prend notre pied et notre palme depuis quelques jours (imagine un port ou tu te lèves et tu plonges dans une eau limpide peuplée de poissons joyeux). L'île pousse encore, ça promet encore d'autres merveilles. Ici c'est Mars et la Lune, l'automne et l'été aride, le désert et l'Irlande, et on n'a pas tout vu.
Je découvre que l'automne me manquait presque à vivre dans le soleil, les odeurs de terre, d'humus et de forêt prennent au coeur directement. Pour une heure, c'est pas mal, puis on rebondit dans l'été canarien.


Hierro la magique vit à un autre rythme : on travaille quand on veut, on sourit beaucoup beaucoup, on écoute les légendes et on cherche des alternatives pour l'énergie et l'agriculture.

Ici on s'aventure en stop parce que les quelques guaguas (oui ici on appelle les minibus comme à Cuba, comme ça on s'approche encore davantage de nos objectifs caribéens) font quatre passages quotidiens les bons jours. Alors on marche, on s'aventure, on suit les coulées de laves, les falaises, les pinèdes, les dunes de sable noir, et les rencontres. Par exemple, ce gars qui est pêcheur, mais pas plus de 14 jours par mois sinon on ne vit plus. Il a fait des études puis il s'est dit que c'était quand même bien plus rigolo de vivre de sa passion. Un homme fait en sourires.

Garoé, l'arbre saint qui recueille l'eau des nuages

Et puis ce génie de l'île, un dreadeux qu'on croise deux fois par jours, à tous les coins de l'île, comme si il nous suivait, sauf qu'il est devant. Je pense qu'il est un duende qui veille sur son caillou. On l'a croisé encore aujourd'hui en rentrant d'une balade/baignade au cœur de la nouvelle mer de lave. Il nous a montré des tubes volcaniques, souhaité une bonne mer et rappelé qu'on sera toujours les bienvenus sur son île du bout du monde. Je nous souhaite tous d'y retourner, on s'y sent si bien.


To be, or not to be in Hierro ? To be, definitly

 On quitte ce soir ce petit bout de paradis pour en chercher un autre. Direction le Cap Vert, l'île de Sal. On prévoit un bon vent au départ, on devrait y arriver dans une semaine. Je vous dis à très vite.
Las de siempre









Abalone - nouvelle équipe

Abalone a mille visages, et on le redécouvre à chaque changement d'équipage.


Après les 3 semaines en équipage réduit avec Pierre et Gilles entre Toulon et Tanger (phase 1), le passage à 6 à bord entre Tanger et les Canaries (phase 2), voilà que notre Gilles, le capitaine originel est reparti en France, et le relai a été pris par deux des copropriétaires du navire, Rémi et Henri.

Voici donc les cinq joyeux du bord pour les prochaines étapes.

 


On est reparti cap à l'Ouest, puisque c'est par là qu'on va finalement. Et on a eu la chance de se faire porter, fort et vite par des vents favorables. Voilà qu'Abalone se lâche, heureux sûrement de sentir approcher de longues traversées


On pète les records de vent et de vitesse, et le soleil en rajoute une couche pour faire de nous les plus heureux, t'as vu ?