lundi 28 décembre 2015

T'as voulu voir Bora (et on a vu Bora)

C'est pas la première histoire de traversée à être ici racontée. Il y a eu deux océans quand même, des coups de lanchas épiques dans le Darien, récemment encore du poti marara entre atolls accompagnés de porcelets. Voilà donc une nouvelle pièce pour la collec' : le voyage en cargo. 



Mi décembre, retour à Papeete après cette immersion puamotesque. Il nous reste quinze jours en Polynésie. On veut repartir mais on n'a plus le budget pour l'avion, tellement cher entre les îles. Faute de voilier sur le départ, la seule autre alternative est la goélette : les îles sont approvisionnées toute la semaine par des cargos voyageant entre Tahiti et les archipels. Certains de ces bateaux, qu'on appelle ici goélettes, embarquent aussi quelques passagers (officiellement douze par trajet), on va tenter notre chance. 

On passe donc des heures à Motu Uta, le quai des cargos, à regarder le chargement du Hawaiki nui, un petit cargo bleu atoll qui dessert les îles sous le Vent : Huahine, Raiatea, Tahaa et Bora Bora. C'est justement cette dernière qu'on voudrait atteindre, on y a un rencard avec Mathieu et Anaïs, et un point de chute en couchsurfing. Sauf que ce sont les vacances scolaires, les places sont réservées depuis des mois. Au bureau de la compagnie, on nous dit :"Aita, pas moyen, ça sert pas à grand chose d'attendre les gars, c'est full". Nous on a la tête dure et l'envie d'aventure, alors on veut y croire. 

le quai out encombré de la cargaison de l'Hawaiki nui en attente de chargement


Les heures passent, les dockers s'affairent sous le soleil de plomb, les conteneurs se déplacent et s'entassent en cale, entre d'autres objets moins communs : des pirogues, des velos, un manège même attend son tour.
On est une trentaine à atteindre sous le cabanon, et seuls douze ont leur ticket pour la traversée. Les avis sont plutôt rassurants, ce capitaine est sympa, on a deja fait ça plein de fois. On discute avec Jacqueline qui connait la Bretagne car elle a été à Nantes pour un don d'organe "je leur ai demandé quand j'étais là bas si ça existait depuis longtemps, le don d'organe. Ils m'ont dit que oui. Et nous ici on savait pas, on aurait pu sauver ma soeur..." C'est sa nièce, fille de cette sœur disparue, qu'elle a sauvé d'un rein, l'air de rien, en bord de Loire dans les premiers froids de l'automne.


à droite du manège, le quai commence à se vider
Après 4h de papotages et poirotage, le capitaine se pointe et prend conscience de l'ampleur de la foule du jour.  A sa mine embarrassée, ça semble peine perdue. Il ne peut pas, qu'il dit, pas tant, et on le comprend. Ceux qui ont des tickets embarquent, ceux qui ont une voiture aussi, et puis quelques autres, on ne sait jamais trop pourquoi. Nous, avec nos gueules de touristes, on veut pas griller des places à des locaux rejoignant leur famille pour les fêtes, on ne se sent par prioritaires, on reste derrière. On est 17 derniers énergumènes sur le quais et le capitaine fignole son chargement sans plus oser jeter un coup d'oeil par ici. On n'y croit plus, mais on est têtus, on ne quittera pas ce quai pas avant d'avoir vu s'éloigner ce raffiot qu'on observe depuis des heures.


après 5h de soleil et de poussière, on embarque, ravis !


















Le quai est enfin vide, le manège a été le dernier élément de ce Tetris géant à se faire trimballer au bout de la grue jusqu'au pont. Le capitaine revient, les mines sont déconfites, on redoute le verdict. Allez c'est bon,"nom, prenom, âge, destination", on paie les 2000 francs pacifiques (moins de 20 euros)  et on se faufile entre les éléments de cargaison avec un sourire record, conscients d'être des foutus chanceux. 

Nous voilà donc à bord de l'Hawaiki nui à destination de Bora Bora. Le soleil se couche sur Moorea, l'île en face de Tahiti qu'on ira découvrir plus tard.

le soleil se couche et on s'échappe enfin de Motu Uta, direction le large... (au fond, l'île de Moorea)

Jojo curieux des conteneurs qui nous entourent

C'est un cargo, les marins s'affairent tandis que sur le pont supérieur sur un caillebotis style palette à disposition des passagers, les familles installent leurs nattes et font leur lit de fortune pour la nuit. 



On atteindra Huahine au lever du jour. Une petite heure de manoeuvres entre déchargements et chargements et on repart. Les prochaines îles à apparaître seront Raiatea et Tahaa, puis Bora Bora.



Jo révolutionne le marché du masque de sommeil



5h du mat, au départ de Huahiné, il fait déjà jour

on observe la navigation entre lagons

au fond les montagnes de Bora
Notre petit cargo à quai à Bora


On l'a fait. Nous voilà en territoire icône du tourisme global après 20h de cargo. Amis des contrastes, nous voici servis. La réputation de Bora est surtout faite au fait que l'île ayant été cédée aux USA pendant la guerre, les ricains ont ramené cette image de turquoise et de cocotiers. "GI in Paradise" qu'ils disaient. Aujourd'hui encore, les touristes à Bora sont majoritairement des ricains, suivis par les japonais.



Alors, oui, le lagon est beau, mais niveau carte postale, les Tuamotus ont mis la barre très haute. On apprécie la plage publique de Matira et son eau cristalline qui nous offre notre première vraie aprem de farniente polynésien. Et surtout, on est bien heureux de retrouver les copains. On tente avec eux une échappée sauvage mais on rebroussera chemin, faute de machette sur un chemin presque oublié.




Les Bronzés à Bora Bora


on prend un peu de hauteur

explorateurs

biens contents d'avoir une eau turquoise où se jeter après notre rando loupée


Et puis après deux jours sur place, de jolies rencontres et de chouettes retrouvailles, on remet ça. On re-signe pour l'attente au soleil et dans la poussière, le doute sur les possibilités d'embarquement jusqu'au dernier moment. Et on embarque pour une journée de traversée retour en direction de Tahiti. Le cargo est peuplé de têtes connues, des marins aux passagers, et on connait déjà les raccourcis et les meilleurs points de vue. 

Ce fut donc un Bora express, alternatif, chaleureux et bienheureux. On n'aurait sûrement pas su l'apprécier autrement.

encore pas trop suants, en attendant l'embarquement sur le quai des cargos à Bora




Tikehau et Mataiva : des conseils d'une copine à une émission de TV


Retour dans les Tuamotus après un stop rapide à Tahiti. En huit îles visitées, c'est ici que nous avons notre unique vue aérienne d'un atoll. Malgré les petites distances, passer d'une île à l'autre par le ciel est plutôt hors de prix. On ne le fera donc qu'une seule fois. Voici donc Tikehau qui se dessine derrière le hublot. L'affaire s'est jouée à peu de choses près et nous avons finalement pu suivre les recommandations de Pauline (d'Abalone, pour ceux qui suivent depuis l'an dernier), une copine de Ju qui y a passé quelques mois. Nous nous apprêtons à atterrir dans la pension Hotu, dont les patrons ont la gentillesse d'accepter notre deal de voyageurs : on vient aider en échange du logement et des repas.

Belle surprise, nous sommes logés dans un p'tit bungalow perso sur la plage. Voici notre vie de "travailleurs" !


Devant le bungalow, le réveil n'est pas désagréable !

Très respectueux du voisinage, on fait gaffe où on met les pieds

Gros smile pendant 20 minutes sur bicyclette, allez hop au boulot !
Mission cleanage de cuisine et autre, éponge et bonne humeur !

 Nouvelle mission : nettoyage du motu pour les prochaines excursions

En plein ratissage de feuilles de cocotiers

Purau nous fait une présentation complète des utilisations de la noix de coco ...

... avec exposition s'il vous plaît !

C'est propre hein !
Alors à présent nouvelle mission : donner des p'tits coups de main pendant l'excursion prévue pour un groupe d'agents de voyage qui viennent visiter l'atoll. Ils pourront ensuite le proposer à leurs clients. L'impression générale va être plutôt carrément bonne !


Arrivée à l'ancienne ferme perlière où on peut parfois nager avec les raies mantas (photo sans filtre !)

L'île aux oiseaux est le rare endroit où l'on peut voir des volatiles dans l'atoll. Ailleurs, les œufs sont croqués par les rats.

Atterrissage d'une sterne blanche
 
Gros pique-nique de grillades

Vaisselle dans le lagon, sous l’œil des requins

Les requins attendaient ça, contents !
On profite, ici et maintenant, le regard large
on essaie des trucs

On se relaxe un peu avant de reprendre le bateau

De retour à la pension le ciel nous réserve encore un p'tit cadeau
et un autre





du coup on est heureux, encore
et puis niveau plongée on n'est pas mal non plus
Les raies manta nous décrochent bien des sourires
ça plane sous l'eau
Le temps est en suspension entre les bulles
Bon alors voilà, maintenant il est temps de rendre d'autres services. André, journaliste, passionné de culture polynésienne et soucieux de garder en mémoire les histoires et gestes des anciens, va tourner un nouvel épisode de son émission sur Mataiva. C'est un atoll à deux heures en bateau de Tikehau pour lequel il vient faire la promotion. Malheureusement, il n'y a pas beaucoup de touristes en ce moment. Mais comme nous on est toujours dispos pour rendre service, on accepte (plutôt cinq fois qu'une !) de se faire embarquer comme touristes pendant 4 jours pour être filmés pour cette bonne cause promotionnelle !

Chargement du ravitaillement de pastèques pour Tikehau où elles ne poussent pas

Pour la promotion, on plonge !

A la sortie d'une grotte sous les feux des projecteurs

On vante les mérites du pique-nique qui est véritablement juste délicieux

Ju tresse des couronnes.
L'ancien du village nous dévoile les secrets des plantes et de la forêt

Soirée barbecue : ici il y a seulement deux avions par semaine,  et demain André redécolle, p'tite fête de départ
Le soleil est bien tombé et laisse s'ouvrir la fleur de lune
Dernière p'tite photo sur le terrain de foot
On prend bien connaissance de la réglementation en vigueur dans les avions

On tient à adresser un milliard de mercis à Hervé et Vanina, ainsi que toute l'équipe de la pension Hotu, pour leur fabuleux accueil et leur générosité